Bois, fers, papiers et bracelets de justice. Histoire matérielle du droit de punir : hier et aujourd’hui
Colloque international, 2-4 décembre 2010, Université de Genève
Autour d’objets aussi complexes et différents que les « choses banales », l’habitat, la ville, le livre ou encore la culture équestre, Daniel Roche a bien montré l’importance de l’histoire de la culture matérielle pour penser celle des idées, des institutions et des pratiques sociales sous l’Ancien Régime. Ce colloque dans le champ de l’histoire intellectuelle, sociale et institutionnelle du crime et de la justice rend hommage à cette démarche pionnière de l’auteur du Peuple de Paris. Il invite à emprunter les voies de l’histoire de la culture matérielle pour penser celles du droit de punir. Problématique de la matérialité judiciaire et pénale à construire dans la longue durée depuis l’Antiquité jusqu’à aujourd’hui, entre continuité (hégémonie du pénal selon Mario Sbriccoli) et rupture (homo criminalis comme ennemi social versus homo criminalis comme pécheur ; État de droit versus État justicier ; légalité versus arbitraire ; prison versus supplice). Doctrine, lois et pratiques selon les archives judiciaires : on montrera ce qu’apporte la matérialité des mots et des choses dans l’économie du droit de punir ancien et moderne. Papiers, monuments, costumes et instruments de justice consacrés à marquer les corps ou à instaurer rituellement l’autorité sacralisée du pénal : l’archéologie judiciaire est prometteuse pour donner sens aux usages judiciaires et pénaux. Souvent matrice de sa ritualité, la matérialité du droit de punir en détermine l’anthropologie. Au nom de l’égalité et de l’utilité, Bentham le matérialiste ne rêvait-il pas d’une « machine » à fouetter pour diminuer l’émotion de l’exécuteur et rendre parfaitement uniforme la norme pénale ?
Ce colloque aspire à historiciser les dimensions du pénal dans l’épaisseur de sa matérialité. On en pensera la périodisation, les enjeux normatifs, les visées symboliques, la ritualisation, l’efficacité punitive ou encore les processus d’innovation et/ou de bricolage. On en mesurera les déclinaisons institutionnelles et les styles judiciaires. Diverses problématiques pour mesurer qualitativement le lent passage d’une justice exercée d’individu à individu à une justice médiatisée par les technologies lourdes et subtiles du contrôle social.
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Illustration: Plan de la guillotine du département du Simplon, par l’architecte genevois Joseph-Louis Brolliet (16 avril 1812), Archives d'Etat de Genève, ADL B 788.