Nous ne mangeons pas de ce pain-là : à propos du 14 juillet (15 juillet 1935)a
Certains voudraient nous voir prendre position dans la lutte qui met aux prises un Front dit « national » et un Front dit « populaire ».
Nous demandons ce que peut bien signifier l’opposition du peuple et de la nation ? Par quel grossier abus du mot nation a-t-on pu venir à cette alternative ?
Lorsqu’à Valmy le général Kellermann entraîne ses troupes au cri de « Vive la Nation ! », les sans-culottes comprennent : « Vive la Révolution ! » Ils ont raison.
Pour nous, la vraie nation française c’est la communauté des personnes responsables, conscientes de la mission libératrice de la France.
Nous pouvons nous dire nationaux, contre l’idole sanguinaire du nationalisme moderne. Nous pouvons nous dire patriotes, contre les sociétés anonymes qui ruinent des provinces entières et financent le Front national. Nous pouvons nous dire populaires, contre les démagogues apeurés qui font le jeu d’une dictature aux ordres des nationalistes russes. Nous sommes contre un système capitaliste, à droite, ou étatiste, à gauche, qui tente de créer ces meurtrières confusions : la confusion de la patrie et des banquiers, la confusion de la Révolution et des Soviets. Nous ne nous battrons ni pour les Forges, ni pour les agents de Moscou : les uns et les autres poursuivent par des voies tactiques opposées (mais en apparence seulement) un seul et même but concret : ils veulent une dictature, un « état fort ». La dictature mène à la guerre entre autres.
Faut-il préciser contre qui ? Leurs intérêts pratiques se rejoignent très bien par-delà les massacres de rue qu’ils nous préparent, — par-dessus la tête de leurs troupes.
Nous nous battrons le jour où le peuple français aura compris que l’adversaire unique est le capitalisme centralisateur, anonyme aujourd’hui — à droite, étatiste demain — à gauche, dans l’un et l’autre cas destructeur de la liberté des personnes, destructeur du sentiment patriotique, destructeur à gauche et à droite des forces vives du pays.
À l’heure présente, une chose est claire : le Front populaire travaille pour M. Litvinoff, le Front national travaille pour M. de Wendel. Et si les militants de gauche et de droite l’ignorent encore, c’est en vertu d’une double erreur que l’Ordre nouveau seul a dénoncé depuis longtemps :
Erreur sur la tactique : lorsqu’on voit la gauche et la droite proclamer la priorité du « plan d’action » sur la doctrine, on est sûr que cette gauche et cette droite travaillent en fait pour le désordre, et que les seuls bénéficiaires de luttes civiles aussi mal orientées seront en fait les gros bailleurs de fonds.
Erreur sur la mystique : la lutte des « nationaux » contre les « populaires » ne fait que prolonger dans la rue l’opposition stérile et périmée de la droite et de la gauche parlementaires. Seulement, cela se complique cette fois de matraques et de mitrailleuses. Au lieu de tomber un ministère quelconque, on s’apprête à descendre des centaines de Français. Au bénéfice de qui, nous l’avons dit.
Quand les droites auront compris que la Banque de France est contre la patrie, quand les gauches auront compris que la peur de Chiappe n’est pas un programme, sonnera l’heure de l’Ordre nouveau.